Pour une réconciliation des évangéliques français avec les Eglises des diasporas

«Nous devons intentionnellement être déterminés à avancer prudemment» dans la réconciliation et les relations avec les Eglises des diasporas au sein de l’évangélisme français, a déclaré le président du CNEF (Conseil national des évangéliques de France), Erwan Cloarec. Les responsables des œuvres et Eglises membres de la faîtière évangélique française étaient réunis ce jeudi 5 juin à Paris pour leur assemblée plénière semi-annuelle. Avec pour thème «Vers une mission en communion avec les Eglises des diasporas», la matinée a permis aux participants de prendre connaissance des propositions qui ont émergé lors du Forum des Eglises des diasporas qui s’est tenu le 8 mai 2025, lors de l’événement La Place. «Nous ne devons pas attendre de parler le même langage théologique pour avoir des relations», a encore déclaré Erwan Cloarec. «Nous arrivons avec un cœur souple et un désir de fidélité.»
La diversité culturelle est au cœur du projet de Dieu
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«La diversité culturelle est au cœur du projet de Dieu», a souligné le pasteur Serge Oulaï pasteur de l’Alliance des Eglises évangéliques interdépendantes (AEEI) en ouverture. Il a évoqué la Pentecôte comme une tour de Babel inversée, permettant l’union des peuples et des cultures en Christ. Il a partagé son expérience personnelle douloureuse quand, en 2010, après des études à la Faculté libre de théologie évangélique de Vaux-sur-Seine, il n’a pas été accueilli comme pasteur dans une Eglise sous prétexte de différences culturelles et d’inaptitude à cause de ses origines africaines. Aujourd’hui, il se bat contre ces idées reçues.
Les pasteurs Olivier Lô et Hugues Zoa ont présenté un résumé de la journée du 8 mai. Ils ont ainsi pointé plusieurs obstacles qui étaient remontés lors du Forum des Eglises des diasporas: la barrière de la langue, le repli communautaire, les blessures postcoloniales, le racisme ou encore les difficultés d’intégration. Mais des leviers ont aussi été mis en lumière: une jeunesse moins marquée par les divisions, des réseaux comme le CNEF ou encore la richesse des complémentarités entre Eglises.
Trois clés ont été mises en avant pour évoluer: oser la rencontre intentionnelle, reconnaître et valoriser les différences et se rassembler autour de la mission de l’Evangile. Des pistes concrètes ont été avancées pour favoriser les relations entre les Eglises des diasporas et les Eglises françaises: des échanges de chaires entre pasteurs, des rencontres fraternelles (cultes communs, repas, actions sociales), le développement de plateformes locales pour l’échange d’informations, la formation à la diversité et au leadership interculturel et enfin l’implication des jeunes.
Un seul corps malgré les cultures différentes
Le temps fort de la matinée a été la table ronde «Plusieurs cultures, plusieurs histoires, un seul corps!», animée par le missiologue Timothée Joset. Pour Serge Oulaï, «le 8 mai n’est pas la fin, mais le début d’un processus.» Il a déploré le décalage entre le constat théologique – «nous sommes tous membres d’une famille spirituelle» – et la réalité de l’Eglise. Etienne Grosrenaud a fait part de sa perplexité face à la lenteur du processus tout en mentionnant l’importance «d’agir avec discernement». Pour Monicker Desgranges, «le 8 mai fut un événement extraordinaire, mais il faut continuer la bataille.»
Le corps du Christ a des blessures à identifier et à soigner.
Hugues Zoa
Erwan Cloarec a également salué le Forum des Eglises des diasporas comme un moment historique et spirituel: «Ce moment était un temps de Dieu.» William Huang s’est réjoui des relations déjà présentes entre les Eglises chinoises et françaises. Il a témoigné d’un premier fruit du forum: «Deux semaines après, un pasteur rencontré lors de l’événement m’a appelé pour me proposer un repas fraternel: c’est un très bon début!» Enfin, Hugues Zoa a pointé la nécessité de «mettre les mots sur les maux», mais pour lui, le processus sera long pour que les blessures du racisme et de l’histoire soient guéries. «Le corps du Christ a des blessures à identifier et à soigner.» Avant de conclure: «Le monde observe: authenticité et solidarité sont nécessaires. C’est une évangélisation silencieuse.» Ce Forum représente une nouvelle pierre dans l’histoire du CNEF, né lui-même d’une réconciliation.