Aide à mourir: les évangéliques mettent en garde les députés

Une nouvelle fois, des voix chrétiennes s’élèvent pour exprimer leur inquiétude face au projet de loi sur la fin de vie, actuellement en discussion à l’Assemblée nationale. Le 22 mai, le Conseil national des évangéliques de France (CNEF), qui représente 75% des Eglises protestantes évangéliques de l’Hexagone, a rendu publique une lettre qu’il a adressée à l’ensemble des parlementaires.
Trois jours plus tôt, le 20 mai, les députés ont voté certains critères qui permettraient à un patient de solliciter une aide médicale à mourir: il doit être majeur, français ou résidant en France et capable d’exprimer sa volonté de façon éclairée. La souffrance endurée peut être physique ou psychologique, et causée par une «affection grave et incurable», en phase avancée ou terminale.
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Trop de personnes potentiellement concernées
Le CNEF réagit fermement, estimant que la notion d’«affection grave et incurable» «élargit considérablement le vivier des personnes éligibles». Ces critères pourraient permettre à 13,8 millions de personnes souffrant d’affection de longue durée (ALD) de demander «que leur vie soit abrégée», souligne la lettre. Dans cette perspective, la faîtière évangélique interpelle les élus: «Donnons-nous collectivement les moyens d’augmenter [le] désir de vie», demande-t-elle aux députés et sénateurs, en mettant l’accent sur le développement des soins palliatifs. L’organisme dénonce par ailleurs une posture «cynique» qui transparaît selon lui dans certains discours, tandis qu’il est prévu que la «mort assistée» soit qualifiée de mort naturelle. Cette rhétorique «doit nous alerter sur des motivations qui vont bien au-delà des prétendues déclarations d’humanisme», déclare le CNEF, en soulevant les aspects financiers liés au projet de loi.
En effet, plusieurs mutuelles se sont déclarées favorables à l’aide active à mourir. Dès mars 2023, aux côtés de l’Association pour le droit de mourir dans la dignité (ADMD), la Mutuelle Générale de l’Education nationale (MGEN), la Fédération des Mutuelles de France (FMF), Mutuale, entre autres, ont publié une position commune en ce sens.
Une procédure expéditive
Le CNEF souligne également que les délais du processus pourraient être extrêmement courts: le texte initial prévoit quinze jours maximum pour la réponse d’un médecin à une demande d’aide active à mourir, et le patient a ensuite 48 heures pour prendre sa décision et réitérer ou non sa demande. «Aucun examen psychiatrique préalable», fait encore remarquer l’organisme. «L’avis d’un second médecin est en effet simplement consultatif, laissant entre les mains d’un individu tout-puissant la responsabilité de la décision finale.» Ces dispositions figurent dans la proposition de loi initiale, mais n’ont toutefois pas été adoptées définitivement à ce jour. Les discussions parlementaires, entamées le 12 mai, doivent se poursuivre jusqu’au 27, date prévue pour le vote solennel sur l’ensemble du texte.
«Nous croyons que la dignité d’une société devrait se mesurer à sa capacité à protéger et entourer les plus faibles plutôt qu’à précipiter leur disparition. Nous prions, en tant que protestants évangéliques, que la France reste cette société-là», conclut le Conseil national des évangéliques de France.