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En politique, chaque «non» comporte un «oui» plus exigeant

Chaque mois, Christianisme Aujourd'hui offre une tribune libre à un acteur du protestantisme évangélique d'expression française
Evangéliques.info

La commission d’éthique protestante évangélique, commission commune aux Eglises libres, baptistes de la Fédération et réformés évangéliques de France, a publié le 23 juillet dernier un texte: «Les lignes directrices d’une éthique sociale chrétienne».

Pourquoi un tel texte et maintenant? Ce n’est pas l’actualité mais une réflexion de fond, entamée par le théologien baptiste Louis Schweitzer et reprise par notre commission, qui nous a poussés à publier un texte sur l’éthique sociale. Nous avons constaté en effet que les Eglises évangéliques francophones ne disposent pas, comme les catholiques et depuis longtemps, d’un riche corps de textes sur l’éthique sociale. Ce n’est donc pas un texte de circonstance mais il sonne très juste dans une actualité où des politiques allient insécurité et étrangers.

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Notre texte prend comme modèle la parabole du Bon Samaritain. Il fait de l’amour du prochain le cœur de l’éthique sociale: «La justice n’est pas fondamentalement différente de l’amour». Or le Samaritain, c’était justement pour le Juif de l’époque la figure de l’autre haï, étranger et en plus d’une autre religion, qui ne méritait donc pas d’être considéré comme un prochain. De plus, des brigands samaritains agressaient effectivement des pèlerins juifs en route pour Jérusalem. Mais Jésus retourne la figure haïe en modèle d’amour du prochain. C’est un étranger qui ne me traite pas en étranger!
–CREDIT–
Mais nous notons aussi les limites de la parabole: si les agressions se répètent, la charité ne suffit plus: «L’action des chrétiens ne peut donc se limiter à la charité quand ce sont des changements sociaux structurels qui sont nécessaires pour assurer la dignité des personnes. Il est alors légitime de passer à un niveau politique». Seulement, l’action politique légitime contre l’insécurité, ce n’est pas de faire des étrangers des boucs émissaires de l’insécurité!

Je voudrais dire mon inquiétude devant ces politiques qui jouent à mettre le feu à l’opinion. Le rôle des chrétiens est au contraire d’éteindre l’incendie du ressentiment social, non par un discours droits-de-l’hommiste à l’eau tiède, mais par une parole et une action fondées sur l’Evangile qui rend libre vis-à-vis de toute idéologie, qu’elle soit xénophobe ou qu’elle nie la réalité du péché.

Les chrétiens évangéliques ne peuvent rester indifférents à la dégradation des relations sociales. Ils doivent être actifs dans la recherche du «bien de la ville». Cela peut aller jusqu’à prendre des responsabilités politiques. Comme le dit notre déclaration, citant Emmanuel Mounier, ils ne peuvent se contenter d’être «contre»: «Il est temps que les chrétiens comprennent que chaque “non” comporte un “oui” infiniment plus exigeant.»

Luc Olekhnovitch, pasteur libriste et président de la commission d’éthique

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