Donald Trump «en mission pour Dieu»?

Donald Trump est apparu sur son réseau Truth Social le 29 mai vêtu d’un long manteau noir, marchant fermement dans la nuit en direction de l’objectif. «Il est en mission pour Dieu et rien ne pourra empêcher ce qui arrive», lit-on sur le meme, image publiée sur son compte. C’est loin d’être la première fois que le président étatsunien se présente, ou est présenté, comme investi d’une mission divine. En janvier lors de son discours d’investiture, il a répété qu’il avait été «sauvé par Dieu pour redonner à l’Amérique sa grandeur» lorsqu’il avait été touché à l’oreille lors d’un attentat.
Bien que certains éléments visuels soient sujets à interprétation, André Gagné, professeur ordinaire et directeur du Département d’études théologiques à l’Université Concordia à Montréal, considère que «pour les évangéliques qui l’ont soutenu, l’essentiel, c’est le texte: il est en mission, c’est une mission divine et rien n’empêchera ce qu’il va accomplir. Ils l’ont soutenu parce qu’ils estiment que Dieu l’a choisi. C’est ce message que Donald Trump veut lancer d’abord.» Les détails qui ne sautent pas aux yeux, souligne l’auteur de Ces évangéliques derrière Trump (éd. Labor et Fides), sont cependant susceptibles d’attirer l’intérêt de différents autres groupes de personnes.
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Entre les lignes
Ainsi en arrière-plan, «Pepe the frog» (Pepe la grenouille) attend sur le trottoir. Cette figure est utilisée notamment sur internet outre-Atlantique dans des contenus de promotion du nationalisme blanc. «L’image a été produite par un site associé aux « Groypers », un mouvement qui exhibent des tendances de suprématie blanche, de xénophobie, etc. », relève André Gagné. L’expression «Rien ne peut arrêter ce qui arrive» figure par ailleurs parmi les slogans de QAnon, mouvement politique dont les adeptes croient, entre autres, que Donald Trump combat un réseau mondial de trafic d’enfants dirigé par un réseau satanique. «Ce qui arrive» pouvant dans ce contexte désigner le jour où ce groupe, qui contrôlerait également un certain nombre de politiciens et les grands médias, sera démantelé par le président des Etats-Unis.
Quant à la première partie de la phrase, elle fait allusion à la réplique «We’re on a mission for God», issue de la comédie «The Blues Brothers» sortie en 1980. D’après Screen Rant, cette déclaration qui surgit au milieu d’un film humoristique «élève leur quête [des personnages] à une cause juste, insufflant à leurs aventures folles un sens du devoir». «Dans le film, ils sont en mission pour Dieu malgré le fait qu’ils agissent de manière illégale», appuie André Gagné. «On peut y voir une allusion au fait que Donald Trump peut faire un peu n’importe quoi, même si ce n’est pas dans la légalité, pour accomplir sa mission.»
Un roi païen au service de Dieu ?
Citant le soutien de Donald Trump à Israël en parallèle de ses accords avec l’Arabie saoudite ou l’Iran, ou encore le fait qu’il nourrisse, mais de façon ambigüe, différentes tendances de pensées et idéologies, le théologien souligne que «durant toute sa carrière présidentielle, il a joué sur toute une palette de registres», au point de questionner la cohérence de ses actions et discours.
Mais il faut s’attarder sur l’image pour voir les éléments qui renvoient à autre chose que la présupposée élection divine de Donald Trump. «Des évangéliques parlent de lui comme du nouveau roi Cyrus, roi païen choisi par Dieu pour accomplir sa volonté (Esaïe 45). Beaucoup font un parallèle. Ils pensent qu’il n’est pas nécessairement morale ou éthique, mais que Dieu peut l’utiliser à ses fins.»