Aide à mourir: les évangéliques attristés

En réaction à l’adoption par l’Assemblée nationale en première lecture, le 27 mai, du projet de loi instaurant un «droit à l’aide à mourir», le Conseil national des évangéliques de France (CNEF) a publié une brève déclaration sur ses réseaux sociaux le soir-même. Il salue «les avancées positives en faveur du développement des soins palliatifs», au cœur de l’un des deux volets du projet de loi qui a, lui, été voté à l’unanimité par les députés. L’organisme déplore néanmoins ce qu’il est advenu du second. «Le vote favorable des députés du projet de loi relatif à la fin de vie nous attriste.» « Dieu nous a créés en donnant à tous une valeur égale et inaltérable, indépendamment de ses facultés, de son âge ou de sa santé.» Une position que le CNEF, qui représente plus de 70% des Eglises protestantes évangéliques du pays, a toujours défendu. «Nous regrettons donc cette loi qui permet de donner la mort.»
«Redisons-le», s’insurgeait pour sa part le Comité protestant évangélique pour la dignité humaine (CPDH) durant l’examen du projet de loi, «l’euthanasie ne supprime pas la douleur, elle supprime le patient, le malade, notre semblable! Car la mal-nommée “aide à mourir” n’aidera ni la personne en fin de vie, ni sa famille, ni les équipes soignantes qui les entourent.» Conclusion: «La proposition de loi Falorni demandant la légalisation de l’euthanasie n’est pas “une grande loi d’égalité”, comme le prétendent ceux qui la soutiennent, mais une proposition funeste cherchant à consumer ce qui nous reste de fraternité.»
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Clivage
Le texte sur le «droit à l’aide à mourir» est cependant loin d’avoir fait consensus. Globalement, la gauche et le centre se sont majoritairement prononcés pour, la droite et l’extrême droite majoritairement contre. 305 députés s’y sont montrés favorables, 199 se sont positionnés contre, et 57 se sont abstenus.
Plusieurs critères ont été retenus pour qu’un patient puisse accéder à l’aide à mourir, soit par auto-administration d’un produit létal soit, s’il n’en est pas capable, avec l’intervention d’un médecin ou d’un infirmier. Le patient doit être majeur, français ou résident en France, atteint d’une affection «grave et incurable, quelle qu’en soit la cause, qui engage le pronostic vital, en phase avancée ou terminale», éprouver une souffrance physique ou psychologique constante réfractaire aux traitements (…) ou insupportable selon lui lorsqu’il a choisi de ne pas recevoir ou d’arrêter un traitement», et être lucide.
Une première étape
La souffrance psychique seule, précisent les sites officiels, «ne peut en aucun cas permettre de bénéficier de l’aide à mourir». Le texte adopté inclut une clause de conscience pour les soignants. Il a également été modifié sur un point sensible: la cause du décès ne peut pas être enregistrée comme «mort naturelle», contrairement à ce que prévoyait la version initiale.
Ce n’est cependant que le début du processus législatif. Les deux volets du projet de loi devront être examinés par le Sénat, à majorité de droite. Une première lecture avec de potentielles modifications est prévue en octobre, avant un retour du texte à l’Assemblée nationale, dans le cadre de la navette parlementaire. Dès le 22 mai, le Conseil national des évangéliques de France avait envoyé un courrier à chaque parlementaire, leur demandant «d’agir pour une société humaine qui soigne, accompagne, protège et honore la vie».
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